Un syndicat n’a pas qualité à agir aux lieu et place du comité social et économique au titre d’un prétendu défaut de consultation dont le CSE lui-même ne se plaint pas. Il ne peut que s’associer à l’action du comité.

Le 16 mars 2020, en raison de l’épidémie de Covid 19 et lors d’une réunion du CSE central de Renault, il est décidé de fermer l’ensemble des 12 sites industriels, dont l’usine de Sandouville. Le 15 avril suivant, à la suite d’une réunion de la commission centrale de santé, sécurité et conditions de travail, le CSE central est informé et consulté sur les mesures de prévention des risques relatifs à la Covid 19. Le même jour, ces mesures sont transmises à l’ensemble des CSE d’établissement du groupe. Le 23 avril 2020, le CSE d’établissement de l’usine de Sandouville rend un avis sur les modalités d’organisation concrètes propres à son site.

Un projet modifiant les conditions de travail selon la CGT

Le 27 avril, la CGT de Renault Sandouville et plusieurs salariés portent l’affaire en justice en agissant en référé.

Pour l’organisation syndicale, « le projet portant sur les modalités organisationnelles de l’activité en vue de la reprise de la production pendant l’épidémie de Covid 19 constituait un projet important modifiant les conditions de travail nécessitant la consultation des instances représentatives du personnel et non leur simple information ». Il est notamment demandé au président du tribunal judicaire du Havre d’annuler la réunion du CSE de Sandouville du 23 avril 2020, de condamner Renault à reprendre au début la procédure d’information/consultation et d’ordonner la suspension pendant ce temps de la mise à exécution du projet portant sur les modalités organisationnelles de l’activité.

Dans une ordonnance du 7 mai 2020, le juge des référés se déclare compétent et fait droit aux différentes demandes de la CGT.

La cour d’appel de Rouen, saisie par Renault, juge au contraire que l’action intentée par la CGT de Renault Sandouville était tout simplement irrecevable.

Une action irrecevable pour la Cour de cassation

Dans un arrêt du 18 mai 2022, la Chambre sociale de la Cour de cassation entérine cette décision d’irrecevabilité (arrêt en pièce jointe).

En effet, comme le rappellent les juges (voir par exemple : Cass. soc., 14 déc. 2015, n° 14-17.152 ; Cass. soc., 25 mars 2020, n° 18-22.465), « si les syndicats professionnels peuvent, devant toutes les juridictions, exercer tous les droits réservés à la partie civile concernant les faits portant un préjudice direct ou indirect à l’intérêt collectif de la profession qu’ils représentent (article L. 2132-3), notamment en cas de défaut de réunion, d’information ou de consultation des institutions représentatives du personnel lorsqu’elles sont légalement obligatoires, « ils n’ont pas qualité à agir aux lieu et place de ces institutions au titre d’un défaut de consultation qu’elles n’invoquent pas ».

Ainsi, en l’absence d’action engagée par le CSE de Renault Sandouville à laquelle la CGT aurait pu s’associer, les demandes de l’organisation syndicale étaient donc bien irrecevables.

Remarque : dans le même ordre d’idée, il a déjà été jugé qu’un syndicat ne peut pas demander communication à son profit de documents qui, selon lui, auraient dû être transmis au CSE (Cass. soc., 11 sept. 2012, n° 11-22.014), ni exiger la remise au comité de documents que celui-ci n’a pas réclamés (Cass. soc., 16 déc. 2014, n° 13-22.308).

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