La mise en place d’une fiche de suivi journalier des vendeurs, qui ne sert ni à les évaluer, ni à leur fixer des objectifs, ne constitue pas un projet important permettant au CSE de décider d’une expertise.
Comme en avait déjà le droit tout CHSCT, dans les entreprises de 50 salariés et plus, le CSE peut se faire assister par un expert en cas de projet important modifiant les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail (article L. 2315-94). Mais à la différence du CHSCT, qui ne disposait d’aucun budget, cette expertise n’est plus à la seule charge de l’employeur puisque le comité social et économique a l’obligation d’en prendre 20% à son compte, sur son budget de fonctionnement.
« Projet d’aménagement important ou pas projet d’aménagement important ? » : c’est la question que les élus du CSE doivent impérativement se poser lorsque l’employeur leur présente un projet et qu’ils souhaitent se faire assister par un expert habilité en qualité de travail et de l’emploi. Il n’y a pas de réponse toute faite à cette question, tout va dépendre de l’impact que le projet est susceptible d’avoir sur les conditions de santé et de sécurité ou les conditions de travail des salariés. Nouvelle illustration avec un arrêt de la chambre sociale de la Cour de cassation en date du 30 septembre 2020.
Le CHSCT lance une expertise pour une étude d’impact
L’affaire se déroule au sein d’un magasin de la région parisienne d’une grande enseigne d’ameublement, de décoration et d’électroménager. Après la décision de la direction de l’enseigne de mettre à la disposition des responsables de rayon un document d’animation commerciale permettant de faire un suivi d’activité journalier des vendeurs, le CHSCT du magasin décide par délibération du 15 février 2019 de recourir à une mesure d’expertise en vue de réaliser une étude d’impact.
A la demande de l’employeur, la délibération en question est annulée par le président du tribunal de grande instance. Pour le juge, « la fiche de suivi journalier n’était ni un outil d’évaluation des salariés, ni une fiche de fixation d’objectifs », et en outre que « seuls les vendeurs et indirectement les responsables de rayon étaient concernés par cette fiche ». Il s’agissait d’un « document sans conséquence sur l’évolution professionnelle des salariés concernés » car il n’avait « d’incidence ni sur leur évaluation, ni sur leur rémunération ».
Pas un projet important derrière cette fiche
Considéré par la direction elle-même comme « un simple document d’animation commerciale destiné aux équipes de vente », ce document ne pouvait donc pas être qualifié de projet important car, pour le juge, il ne modifiait pas la répartition des postes et ne compromettait en aucune manière l’hygiène, la sécurité et les conditions de travail des salariés. En conséquence, rien ne justifiait l’expertise décidée par le CHSCT.
Un ultime recours en cassation du CSE, qui s’était entre-temps substitué au CHSCT, n’y changera rien.
La Cour de cassation confirme, la délibération du CHSCT est donc définitivement annulée.