Lorsque l’employeur et un représentant du personnel envisagent de conclure une rupture conventionnelle du contrat de travail, quelle est la procédure à observer ? Notre réponse, sous forme de synthèse, à cette question posée en début de semaine par un délégué du personnel.

La loi de « modernisation du marché du travail » du 25 juin 2008 a créé, aux côtés du licenciement et de la démission, une nouvelle voie pour rompre le contrat (articles L. 1237-11 et suivants). La rupture conventionnelle intervient d’un commun accord entre l’employeur et le salarié. Autrement dit, il faut que l’employeur et le salarié acceptent la rupture conventionnelle. Le refus n’est peut être fautif, sauf abus. La rupture conventionnelle, qui continue en 2019 de rencontrer un vif succès, est assortie d’une indemnité de rupture au moins égale à l’indemnité légale (ou conventionnelle) de licenciement et bénéficie en principe des conditions d’exonération sociale et fiscale de cette dernière. À l’identique du licenciement, la rupture conventionnelle permet au salarié de bénéficier des allocations de chômage. La rupture conventionnelle avec un salarié protégé est possible, mais il faut suivre une procédure spéciale qui intègre des éléments de la demande d’autorisation de licenciement auprès de l’inspecteur du travail.Etape 1 : organiser au moins un entretienL’employeur et le salarié protégé (membre de CSE, délégué syndical, etc.) qui souhaitent rompre le contrat de travail doivent d’abord organiser un ou plusieurs entretiens afin de définir les modalités de la rupture. Les règles d’organisation de ces entretiens et d’assistance des parties sont celles de la rupture conventionnelle « classique ». Une circulaire du 30 juillet 2012 précise que l’employeur doit donner, lors des entretiens, une information précise sur le régime fiscal et social de l’indemnité.Etape 2 : rédiger le projet de rupture conventionnelleLe contenu de la convention de rupture correspond à celui prévu pour les salariés « classiques ». L’imprimé officiel à remplir (en pièce-jointe ci-dessous) est identique, à l’exclusion du dernier paragraphe consacré à l’homologation par la Direccte (direction régionale du travail), puisque la demande doit ici être envoyée à l’inspecteur du travail.

A noter : l’employeur doit indiquer, lorsque la consultation du comité d’entreprise ou du CSE est requise, la date de cette consultation et l’avis rendu par le comité (voir l’étape n°3 ci-dessous). Etape 3 : saisir le comité social et économique (ou CE)

À partir de cette étape, la procédure mélange les règles de la procédure de rupture conventionnelle et celles de la demande d’autorisation de licenciement d’un salarié protégé (article L. 1237-15 du code du travail). La loi renvoie à certaines des dispositions applicables en cas de licenciement d’un représentant du personnel. Il en résulte notamment que le comité social et économique (ou le comité d’entreprise, s’il existe encore) doit être consulté dans les conditions habituelles comme s’il s’agissait d’un licenciement (audition du salarié, adoption d’un avis, etc.).

Pour la rupture conventionnelle du salarié protégé qui est uniquement délégué syndical, il n’y a pas de consultation du CSE/CE.

Cette consultation se tient obligatoirement avant la signature de la convention. La convention présentée aux élus pour avis est donc, à ce stade de la procédure, finalisée mais pas signée.

Quel rôle pour le CSE/CE lors de cette étape ? Les élus ont principalement pour mission d’interroger les parties à la rupture conventionnelle pour s’assurer de la réalité du consentement du salarié, et qu’elle ne résulte pas d’une discrimination syndicale. En revanche, l’instance ne peut pas exiger de connaître le montant de l’indemnité versée au salarié protégé.

Etape 4 : attendre l’expiration du délai de réflexion du salarié (15 jours)

L’employeur ne peut envoyer à l’inspecteur du travail sa demande d’autorisation de rupture conventionnelle qu’après l’expiration du délai de réflexion de 15 jours calendaires décomptés à partir de la date de signature de la convention. Si le délai n’est pas respecté, l’autorisation de la rupture sera refusée.

Conseil pratique : le code du travail impose, en ce qui concerne la demande d’autorisation de licenciement, que l’avis du CSE/CE soit envoyé dans un délai de 15 jours suivant la date de la réunion. Ce délai se confond donc avec les 15 jours du délai de rétractation. Une solution consiste donc à signer la convention de rupture le jour où le comité d’entreprise (ou le CSE) rend son avis, de façon à envoyer la demande exactement 15 jours après. Etape 5 : demander l’autorisation de rupture à l’inspecteur du travail

Après la consultation du CSE, la convention signée par les parties est envoyée pour demande d’autorisation à l’inspecteur du travail dont dépend l’établissement dans lequel le salarié est employé. La demande est formée auprès de l’inspecteur du travail selon les règles habituelles définies par les articles R. 2421-1 et suivants du code du travail : elle doit être lui être transmise soit par lettre recommandée avec avis de réception, soit par voie électronique. Sont joints à cette demande :

  • la convention de rupture (qui n’est pas envoyée à la Direccte mais à l’inspecteur du travail) ;
  • l’avis du CSE/CE.

 Etape 6 : l’inspecteur mène l’enquête et se prononce sous 2 mois

Comme pour un licenciement, l’inspecteur du travail doit procéder à une enquête contradictoire (orale ou écrite). Si le salarié protégé le demande ou si l’inspecteur l’estime nécessaire, le salarié peut être reçu en entretien, assisté le cas échéant d’un représentant de son syndicat. Contrairement à une demande d’autorisation de licenciement, l’inspecteur du travail n’a pas à apprécier l’existence d’un motif particulier qui justifierait la rupture conventionnelle.

L’inspecteur du travail prend sa décision dans un délai de 2 mois (et non plus 15 jours) à compter de la réception de la demande d’autorisation de la rupture conventionnelle. Au-delà de ce délai, le silence de l’inspecteur du travail vaut décision de rejet. Autrement dit, à la différence de la procédure classique de rupture conventionnelle, l’absence de réponse de l’administration fait obstacle à la rupture du contrat.

Attention : comme pour un licenciement, l’autorisation délivrée par l’inspecteur du travail doit viser tous les mandats détenus par le salarié. A défaut, l’autorisation est irrégulière et peut être annulée pour vice de forme.

Etape 7 : rompre le contrat de travail

Le contrat peut être rompu au plus tôt le lendemain du jour de l’autorisation administrative.

À noter : en cas de contestation de la rupture conventionnelle, comme pour le licenciement du salarié protégé, c’est le juge administratif qui est compétent.

Source – Actuel CE