Après vous avoir donné en brève les nouveaux documents, réalisé l’interview d’un spécialiste sur le sujet, nous nous proposons cette fin d’année une synthèse récapitulative sur les nouveaux règlements comptables du CSE, le comité social et économique.
L’Autorité des normes comptables (ANC) le dit elle-même : il n’y a pas de modification notable avec ces nouveaux règlements applicables à la comptabilité des CSE. Il s’agit d’une adaptation aux nouvelles règles relatives au CSE, ainsi qu’à la refonte des règlements comptables auxquels est adossée la comptabilité des CSE, outre ses dispositions spécifiques : le règlement n° 2018-06 du 5 décembre 2018 modifié relatif aux comptes annuels des personnes morales de droit privé à but non lucratif (associations), et le règlement n° 2020-01 du 9 octobre 2020 relatifs aux comptes consolidés.
Datés du 3 septembre 2021, les règlements de l’ANC relatifs aux comptes des CSE ont été homologués par arrêté du 22 novembre 2021 et publiés au Journal officiel du 4 décembre. Ils abrogent les trois précédents règlements comptables applicables aux comités d’entreprise, et entrent en application le 5 décembre 2021.
Ainsi :
- le règlement n° 2021-05 du 3 septembre 2021 relatif aux comptes annuels des CSE (comptabilité des moyens et gros CSE) (C. trav., art. L. 2315-64) remplace le règlement n° 2015-01 du 2 avril 2015 ;
- le règlement n° 2021-06 du 3 septembre 2021 relatif aux documents comptables des CSE (comptabilité des petits CSE) (C. trav., art. L.2315-65) remplace le règlement n°2015-01 du 2 avril 2015 ;
- le règlement n° 2021-07 du 3 septembre 2021 relatif aux comptes consolidés des CSE (C. trav., art. L. 2315-67) remplace le règlement n° 2015-10 du 26 novembre 2015.
Les règlements publiés sur le site de l’ANC comportent des commentaires infraréglementaires utiles à la compréhension que nous reportons dans cet article.
Rappelons qu’outre les comptes annuels, objets de ces règlements, les CSE doivent tous établir un rapport d’activité et de gestion, dont le contenu diffère selon la taille du CSE (C.trav., art. D. 2315-38) et un rapport sur les conventions passées entre le CSE et ses membres (C. trav., art. L. 2315-70). Enfin, pour les gros CSE, la commission des marchés établit un rapport d’activité annuel qui est joint en annexe du rapport d’activité et de gestion (C. trav., art. L. 2315-44-4).
Avant tout, il convient de faire le point sur le champ d’application de ces nouveaux règlements. Ils sont applicables aux CSE, mais aussi aux CSE d’établissement (C. trav., art. L. 2316-26) et aux CSE centraux (C. trav., art. L. 2316-19) comme c’était le cas pour le comité d’entreprise.
Sont également concernés les comités sociaux et économiques interentreprises (CSEI) et les comités des activités sociales et culturelles interentreprises (CASCI). Il s’agit de nouveautés issues de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative au CSE.
Rappelons que les CASCI sont les héritiers des comités interentreprises, créés lorsque plusieurs entreprises possèdent ou envisagent de créer certaines institutions sociales communes (C. trav., art. R. 2312-43 et s. et R. 2312-53 et s.).
Quant aux CSEI, il s’agit d’une nouvelle instance créée par l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 et qui ne se substitue pas aux CSE propres aux entreprises mais s’y superpose le cas échéant. Cette instance conventionnelle entre des entreprises juridiquement distinctes sur un même site ou une même zone qui partagent des problèmes
communs s’apparente aux anciens délégués de site lesquels ont été abrogés par ladite ordonnance (C. trav., art. L. 2313-9).
Comme c’était le cas pour le comité d’entreprise, la grande spécificité des comptes du CSE est la distinction dans toute la comptabilité, ultra-simplifiée (petits CSE), simplifiée (CSE moyens) ou normale (grands CSE), des postes « Attributions économiques et professionnelles » (AEP) (C. trav., art. L. 2312-8) et « Activités sociales et culturelles » (ASC) (C. trav., art. L. 2312-78).
Cela résulte de la dualité et de la séparation des budgets ASC et fonctionnement du CSE. Comme le rappelle l’ANC, ces deux catégories d’attributions du CSE sont gérées séparément et leurs budgets ne sont pas fongibles.
Une nouveauté issue de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 relative au CSE est que le comité a la possibilité d’opérer, après délibération, un transfert de l’excédent annuel d’une section à l’autre, de la section AEP vers la section ASC ou l’inverse, dans le respect des conditions et des limites définies aux articles L. 2315-61, L. 2312-84 et R. 2315-31-1 du code du travail. Ces articles du code du travail encadrent strictement cette faculté de transfert de l’excédent annuel d’une section à une autre.
Remarque : rappelons que le reliquat de budget transférable d’un budget à l’autre après délibération est de 10 % maximum dudit reliquat. Rappelons également que lorsque le financement des frais d’expertise est pris en charge par l’employeur en application du 3° de l’article L. 2315-80 (c’est-à-dire lorsque le budget de fonctionnement du CSE est insuffisant pour en couvrir le coût et n’a pas donné lieu à un transfert d’excédent annuel au budget au cours des 3 années précédentes), le CSE ne peut pas décider de transférer d’excédents du budget de fonctionnement au financement des ASC pendant les 3 années suivantes (C. trav., art. L. 2315-61).
Le CSE peut aussi choisir de transférer l’excédent annuel de la section ASC à des associations dans le respect des conditions et des limites définies aux articles L. 2312-84 et R. 2312-51 du code du travail. Ces articles du code du travail encadrent strictement cette faculté de transfert de l’excédent annuel de la section ASC à des associations.
Remarque : rappelons qu’en cas de reliquat budgétaire le CSE peut décider, par une délibération, de transférer tout ou partie du montant de l’excédent annuel du budget destiné aux ASC à des associations, dans la limite de 10 % de cet excédent (C. trav., art. L. 2312-84). Les dons aux associations sont donc limités à ce cas : 10 % du reliquat de budget des ASC.
Les sommes ainsi transférées entre les deux sections ou à des associations et leurs modalités d’utilisation sont mentionnées dans l’annexe des comptes de l’exercice au cours duquel la délibération sur l’affectation de l’excédent a été votée, c’est-à-dire dans l’annexe des comptes de l’exercice N+1 pour l’affectation de l’excédent constaté à la clôture de l’exercice N pour les moyens ou gros CSE (art. 161-5 du règlement n° 2021-05).
Pour les petits CSE, ces informations doivent être mentionnées dans les documents comptables de l’exercice au cours duquel la délibération sur l’affectation de l’excédent a été votée, c’est-à-dire dans les documents comptables N+1 pour l’affectation de l’excédent constaté en N : concrètement elles figurent dans l’état de synthèse annuel de situation patrimoniale (art. 141-1 du règlement n° 2021-06).
Rappelons d’abord que les « petits CSE » sont ceux dont les ressources annuelles ne dépassent pas 153 000 euros (C. trav., art. D. 2315-35). Par dérogation à l’article L. 2315-64, ces « petits CSE » peuvent s’acquitter de leurs obligations comptables (C. trav., art. L. 2315-65) :
- en tenant un livre retraçant chronologiquement les montants et l’origine des dépenses qu’il réalise et des recettes qu’il perçoit (cet état reprend les éléments au titre de l’exercice comptable précédent);
- et en établissant, une fois par an, un état de synthèse simplifié portant sur des informations complémentaires relatives à son patrimoine et à ses engagements en cours.
Remarque : les petits CSE peuvent ajouter à l’état de synthèse toute information complémentaire qu’ils jugeraient utile de porter à la connaissance des utilisateurs de cet état et peuvent prévoir des subdivisions plus fines que celles prévues dans les modèles de tableaux notamment pour identifier des éléments significatifs.
Le contenu et les modalités de présentation de ce livre et de cet état sont définis par le règlement n° 2021-06 de l’ANC. Ils sont inchangés par rapport au précédent règlement comptable relatif aux « petits CE ».
A noter que ce régime ultra-simplifié est un régime dérogatoire optionnel : les petits CSE peuvent opter pour une comptabilité normale s’ils le souhaitent.
Sont considérés comme « CSE moyens » les comités dont les ressources excèdent 153 000 euros mais qui, à la clôture d’un exercice, n’excèdent pas au moins deux de ces trois critères : 50 salariés, 1,55 million d’euros du total du bilan et 3,1 millions de ressources annuelles (seuils fixés à l’article R. 612-1 du code de commerce) (C. trav., art. D. 2315-33).
Ces CSE peuvent adopter une présentation simplifiée de leurs comptes, selon des modalités fixées par le règlement n° 2021-05 de l’ANC, et n’enregistrer leurs créances et leurs dettes qu’à la clôture de l’exercice (C. trav., art. L. 2315-64, II). Le règlement de l’ANC propose des modèles sous forme de tableaux du bilan et du compte de résultat simplifiés, le CSE devant présenter au minimum les rubriques et les postes qui y sont fixés.
Bien sûr le compte de résultat simplifié propose la distinction obligatoire en deux sections « AEP » et « ASC » (art. 151-1). Ces modèles sont inchangés par rapport au précédent règlement comptable CE.
Remarque : rappelons que les « CSE moyens » doivent confier la mission de présentation de ses comptes annuels à un expert-comptable. Le coût de cette mission est pris en charge par le CSE sur sa subvention de fonctionnement (C. trav., art. L. 2315-76).
Les « gros CSE » sont les comités qui, à la clôture d’un exercice, excèdent au moins 2 des 3 critères ci-dessus. Ces derniers sont soumis aux obligations comptables définies à l’article L. 123-12 du code de commerce. Leurs comptes annuels doivent être établis selon des modalités définies par le règlement n° 2021-05 de l’ANC (C. trav., art. L. 2315-64, I).
Remarque : rappelons que les « gros CSE » doivent nommer au moins un commissaire aux comptes et un suppléant distincts de ceux de l’entreprise qui certifiera ses comptes. Le coût de la certification des comptes est pris en charge par le CSE sur sa subvention de fonctionnement (C. trav., art. L. 2315-73).
Les obligations en matière d’établissement d’une annexe des comptes sont les mêmes pour les CSE moyens et gros (art. 161-1 et s.).
Rappelons que les comptes annuels des CSE sont établis conformément aux dispositions du règlement n° 2018-06 de l’ANC relatif aux comptes annuels des personnes morales de droit privé à but non lucratif (associations), sous réserve des adaptations prévues par le règlement n° 2021-05 relatif aux CSE. Cela n’est pas nouveau, cependant le règlement ANC relatif à la comptabilité des associations a été récemment refondu.
Il est également rappelé qu’à défaut de dispositions spécifiques prévues au règlement ANC n° 2018-06, les dispositions du règlement ANC n° 2014-03 relatif au plan comptable général s’appliquent.
L’une des modifications résultant du nouveau règlement comptable des associations est la prise en compte des contributions en natures reçues par l’organisation. Compte tenu de la spécificité du CSE, le règlement n° 2021-05 prévoit des modalités spécifiques à cet égard.
Remarque : les contributions volontaires en nature sont l’apport de biens ou de services à titre gratuit (mise à disposition de personnes, dons en nature, mise à disposition de locaux ou de matériel…) (art.211-1 du règlement ANC n° 2018-06).
Ainsi, les contributions en nature reçues de l’employeur au titre d’obligations légales ne sont pas des contributions volontaires en nature au sens du règlement ANC n° 2018-06. Les comptabilisées et ne font pas l’objet d’informations dans l’annexe.
NDLR : il s’agit des obligations de l’employeur résultant de l’article L. 2315-25 prévoyant que l’employeur met à la disposition du CSE un local aménagé et le matériel nécessaire à l’exercice de ses fonctions. Les contributions de l’employeur à ce titre ne figurent en aucune manière dans la comptabilité du CSE.
S’agissant des contributions en nature reçues en dehors de ce cadre, les dispositions du règlement ANC n° 2018-06 relatives aux contributions volontaires en nature s’appliquent et sont rappelées ci-après :
- les contributions volontaires en nature sont valorisées et comptabilisées si les deux conditions suivantes sont remplies : la nature et l’importance des contributions volontaires en nature sont des éléments essentiels à la compréhension de l’activité du comité, et le comité est en mesure de recenser et de valoriser les contributions volontaires en nature ;
- si le comité décide de comptabiliser les contributions volontaires en nature, celles-ci sont comptabilisées dans des comptes de classe 8 et présentées au pied du compte de résultat dans la partie « Contributions volontaires en nature », en deux colonnes de totaux égaux. Les modalités de recensement, de quantification et de valorisation des contributions volontaires en nature sont explicitées dans l’annexe ;
- si le comité décide de ne pas comptabiliser les contributions volontaires en nature, le comité mentionne dans l’annexe les motifs de cette décision et donne une information sur la nature et l’importance des contributions volontaires en nature.
Lorsque l’ensemble constitué par le CSE et les entités qu’il contrôle, au sens de l’article L. 233-16 du code de commerce, dépasse, au moins deux des trois critères qualifiant les seuils des « gros CSE », le CSE établit des comptes consolidés, dans les conditions prévues à l’article L. 233-18 du code de commerce.
Les comptes consolidés des comités sont établis conformément aux dispositions du règlement n° 2020-01 de l’ANC relatif aux comptes consolidés, sous réserve des adaptations prévues par le présent règlement.
A noter que le bilan et le compte de résultat consolidés sont établis selon les modèles figurant aux sections 1 et 2 du chapitre I du titre VIII du livre II du règlement n° 2020-01 de l’ANC relatif aux comptes consolidés. Ces modèles sont adaptés afin que les rubriques et les postes des fonds propres au bilan et du compte de résultat soient présentés en distinguant les sections « Attributions économiques et professionnelles » (AEP) et «Activités sociales et culturelles » (ASC). Mais le règlement n° 2021-07 ne propose pas de modèle.
Remarque : rappelons que les CSE devant établir des comptes consolidés doivent nommer au moins deux commissaires aux comptes pour la certification de leurs comptes. Le coût de la certification des comptes est pris en charge par le CSE sur sa subvention de fonctionnement (C. trav., art. L. 2315-73).