Dans un arrêt du 23 juin 2021, la Cour de cassation apporte un certain nombre de précisions sur les formalités à respecter en cas de modification du règlement intérieur.

Un salarié, employé en qualité de technicien de maintenance, a fait l’objet de trois sanctions disciplinaires prévues par le règlement intérieur entré en vigueur le 5 septembre 1983 et modifié en 1985, pour n’avoir pas respecté les règles de sécurité figurant dans le manuel de sécurité et la fiche de consignes de sécurité C28.

Le salarié a saisi la juridiction prud’homale afin de faire annuler ces sanctions. Le syndicat CGT est intervenu à ses côtés pour voir réparer une atteinte à l’intérêt collectif de la profession.

Modification du règlement intérieur après injonction de l’inspection du travail

Selon le code du travail, le règlement intérieur ne peut être introduit qu’après avoir été soumis à l’avis des représentants du personnel (article L.1321-4 du code du travail). De son côté, l’inspecteur du travail peut à tout moment exiger le retrait ou la modification des dispositions contraires aux articles L.1321-1 à L.1321-3 et L.1321-6 du code du travail (article L.1322-1 du code du travail).
Pour annuler les sanctions disciplinaires, la cour d’appel a déclaré inopposable au salarié le règlement intérieur au motif que l’employeur s’était abstenu de consulter les représentants du personnel lors de l’introduction en 1985 de modifications demandées par l’inspecteur du travail.
Ce n’est pas le raisonnement de la Cour de cassation. Selon elle, les modifications apportées en 1985 au règlement intérieur initial, qui avait été soumis à la consultation des institutions représentatives du personnel lors de sa mise en place en 1983, résultaient uniquement des injonctions de l’inspection du travail auxquelles l’employeur ne pouvait que se conformer sans qu’il y ait lieu à nouvelle consultation.
La Cour de cassation s’était déjà prononcée dans ce sens dans une affaire qui impliquaient la même société et le syndicat CGT (arrêt du 26 juin 2019).

Date d’entrée en vigueur du règlement intérieur

Le code du travail prévoit également que le règlement intérieur doit indiquer la date à partir de laquelle il entre en vigueur. Cette date doit être postérieure d’un mois à l’accomplissement des formalités de dépôt et de publicité. Ces dispositions sont également applicables en cas de modification ou de retrait des clauses du règlement intérieur (article L.1321-4 du code du travail). Le délai d’un mois court à compter de la dernière en date des formalités de publicité et de dépôt (article R.1321-3 du code du travail).
La cour d’appel a annulé les sanctions disciplinaires et a déclaré le règlement intérieur inopposable au salarié au motif que l’employeur s’était abstenu de modifier la date d’entrée en vigueur de celui-ci après sa modification en 1985, restée fixée en 1983.
Une fois encore, la Cour de cassation casse la décision des juges du fond. Selon la Cour, il n’est pas nécessaire que l’employeur modifie la date d’entrée en vigueur pour que le règlement modifié soit opposable. Il suffit qu’il ait préalablement respecté les formes prévues par l’article L.1321-4 du code du travail.

Adjonctions au règlement intérieur

Le code du travail précise que les notes de service ou tout autre document comportant des obligations générales et permanentes dans les matières mentionnées aux articles L.1321-1 et L.1321-2 (santé, sécurité, …) sont, lorsqu’il existe un règlement intérieur, considérées comme des adjonctions à celui-ci et sont soumis, en toute hypothèse, aux dispositions à ce sujet (article L.1321-5 du code du travail).
Pour annuler les sanctions disciplinaires prononcées à l’encontre du salarié, la cour d’appel a retenu que celles-ci étaient fondées sur l’inobservation du manuel de sécurité et de la fiche de sécurité C28. Ces documents devaient être considérés, selon les juges du fond, comme une adjonction au règlement intérieur nécessitant dès lors les formalités de consultation et de publicité prévues à l’article L.1321-4 du code du travail, lesquelles n’avaient pas été effectuées.
A tort selon la Cour de cassation qui rappelle que « le document interne par lequel l’employeur se borne à rappeler les dispositions législatives et réglementaires applicables dans l’entreprise en matière de sécurité ne crée pas de nouvelles obligations générales et permanentes s’imposant aux salariés et ne constitue donc pas une adjonction au règlement intérieur ». 
Le Conseil d’Etat avaient déjà précisé que l’employeur n’est pas tenu de reproduire dans le règlement intérieur les dispositions législatives ou réglementaires relatives à l’hygiène et à la sécurité dans l’entreprise (décision du Conseil d’Etat du 4 mai 1988).
Les juges du fond auraient donc dû rechercher si le manuel de sécurité agence et la fiche de sécurité C28 créaient de nouvelles obligations générales et permanentes s’imposant aux salariés.

Source : Actuel-expert-comptable