Formation des élus, consultation du CSE, évolution des documents de prévention… Un webinaire du cabinet Sextant a fait le point vendredi 18 mars sur les conséquences pour les CSE de la loi santé au travail dont on attend encore certains décrets d’application.

Vendredi matin, deux consultants en santé et sécurité du cabinet Sextant, Meriem Alouani et Boris Vieillard, on présenté aux internautes un webinaire sur les conséquences de la loi santé au travail pour les CSE (infographie en pièce jointe). Cette loi est issue du rapport de la députée Charlotte Lecocq, publié en 2018 (lire notre article). Il s’en est suivi une négociation paritaire qui a abouti à l’accord national interprofessionnel de 2020 (lire notre article). Enfin dernière étape, la loi santé au travail du 2 août 2021 (lire notre article) qui entrera en vigueur dans quelques jours, le 31 mars. Voici un tour d’horizon de ce que prévoit le texte pour le CSE et ses élus.

Formation des élus : 5 jours pour un premier mandat

Les consultants de Sextant le rappellent : « La formation est de droit pour les élus du CSE et pour le référent harcèlement sexuel. Elle est prise sur le temps de travail, payée comme tu temps de travail et financée par l’employeur ». Pas question donc d’utiliser des heures de délégation. Et petite subtilité dans les entreprises de 11 à 49 salariés, la formation peut être financée via un opérateur de compétences (OPCO). De plus, la loi ne distingue pas entre les élus titulaires et les suppléants qui disposent du même droit à formation en santé sécurité, de même que les membres de la commission santé. En revanche, la loi ne dit rien sur les représentants syndicaux, il faut attendre de voir si les décrets d’application le préciseront. A défaut, Meriem Alouani et Boris Vieillard suggèrent aux élus de prévoir une clause dans l’accord de fonctionnement du CSE.

© Sextant

La durée légale de la formation en santé sécurité est de 5 jours pour un premier mandat, puis de 3 jours en cas de renouvellement du mandat, y compris pour le référent harcèlement. 5 jours sont également prévus pour les membres de la CSSCT mais uniquement dans les entreprises de plus de 300 salariés.

Le CSE bientôt consulté sur le DUERP

L’employeur est le garant de la santé physique et mentale des employés, qu’ils soient embauchés en CDI, CDD, intérimaires, stagiaires, selon l’article L.4121 du code du travail. Il s’agit d’une obligation de moyens renforcée, l’employeur doit donc prouver qu’il a mis en œuvre tous les moyens à sa disposition pour protéger la santé des salariés. L’obligation comprend :

  • des actions de prévention des risques professionnels ;
  • des actions d’information et de formation ;
  • la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

Trois documents fondamentaux fixent le suivi de la santé et de la protection des salariés : le bilan SSCT de l’année écoulée, le document unique d’évaluation des risques professionnels (DUERP) et le Papripact (programme annuel de prévention des risques professionnels et d’amélioration des conditions de travail). Le CSE était jusqu’à présent consulté uniquement sur le bilan annuel et le Papripact. La loi santé au travail introduit une consultation du CSE sur le DUERP à compter du 31 mars 2022 et ce quel que soit l’effectif de l’entreprise. De plus, la loi exige que le DUERP soit conservé pendant 40 ans avec ses différentes mises à jour (1). « Les maladies peuvent se déclencher longtemps après l’exposition des salariés, c’est la raison de cette nouvelle disposition », explique Meriem Alouani. Le document devra être mis à disposition des salariés mais aussi des anciens salariés et de toute personne qui peut y avoir intérêt comme les services de prévention et la médecine du travail. Enfin, le DUERP devra être dématérialisé et déposé sur un portail numérique. Ces dispositions entreront en vigueur au 1er juillet 2023 dans les entreprises de 150 salariés et plus. Un décret devrait préciser ces obligations.

Une nouveauté sur le Papripact : il devra faire apparaître un calendrier de mise en œuvre de chaque mesure avec un délai d’exécution, les ressources mobilisables de l’entreprise et des indicateurs de résultat sur lesquels les élus pourront challenger la direction..

Le rôle des élus : challenger la direction

« Avec ces nouvelles obligations, les élus vont devoir challenger leur direction sur les sujets de santé » analyse Boris Vieillard. Au CSE donc d’analyser les risques grâce aux DUERP et Papripact et d’être force de proposition. Le consultant ajoute : « Si l’employeur ne réagit pas à une proposition du CSE, il doit le motiver. Et s’il reste inactif, les élus peuvent utiliser leur droit d’alerte pour danger grave et imminent si les conditions en sont réunies ». En effet, les élus peuvent mener des enquêtes, des inspections dans les locaux de l’entreprise et solliciter une expertise. Les consultants de Sextant conseillent aussi que les synthèses et suggestions de la commission santé remontent au CSE afin d’alimenter ses avis.

Quant à l’avis du CSE consulté sur le DUERP ou le Papripact, les consultants de Syndex indiquent qu’il n’a pas à être binaire : « Ne vous contentez pas de rendre un avis positif ou négatif. Montrez par exemple que la politique de prévention est insuffisante, que les actions sont seulement tertiaires, que le pilote des actions de prévention n’est pas identifié et déduisez-en que l’employeur ne respecte pas ses obligations. Vous pourrez alors faire des demandes pour compléter les dispositifs d’évaluation, associer les salariés ou définir un plan d’action ».

© Sextant

Au sujet du Papripact, ils conseillent également que les élus vérifient que les actions de l’employeur respectent les principes de prévention en distinguant ce qui relève de la prévention primaire, secondaire ou tertiaire. La prévention primaire permet seule de remonter aux causes du risque. Par exemple, en matière de formation du management aux risques psychosociaux, il conviendra de demander une étude dur la charge de travail des managers (action primaire), et de réduire les injonctions qui les empêchent de manager leurs collaborateurs avant de les envoyer en formation (action tertiaire). Si toutes les actions sont prévues au 2ème semestre, les élus pourront demander que soient déterminées des actions prioritaires en début de semestre et des actions secondaires en fin de semestre.

 

(1) Un décret d’application relatif au DUERP a été publié au Journal officiel ce dimanche 20 mars. Nous y reviendrons dans une prochaine édition.

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