N’ayant pas de représentant légal, le CSE doit impérativement donner mandat à l’un de ses membres pour le représenter en cas d’action en justice. A défaut, son action est irrecevable.

Certains élus du personnel, et même certains DRH, pensent que le secrétaire du CSE, et le secrétaire adjoint quand il y en a un, sont les représentants légaux du comité social et économique et qu’ils sont donc automatiquement habilités à le représenter et à accomplir tous les actes juridiques en son nom. Il ne faut pas s’y méprendre car, sur un plan juridique, c’est faux.

Comme le précise pour la première fois pour le CSE une récente jurisprudence de la Chambre sociale de la Cour de cassation, le comité social et économique n’a pas de représentant légal.

► Remarque : par le passé, il a été jugé que le secrétaire du comité d’entreprise n’en est pas le représentant légal (Cass. soc., 4 avr. 2001, n° 99-40.677) et que le président du comité d’entreprise ou d’établissement n’en est pas le représentant s’il n’a pas été mandaté à cet effet (Cass. soc., 19 nov. 1986, n° 85-11.357). Il n’y avait donc pas de raison qu’il en aille autrement pour le CSE.

Cette jurisprudence présente un autre intérêt en ce qu’elle décide, en toute logique, que la délibération adoptée par un CHSCT en vue d’une expertise demeure valable même si le CHSCT a disparu de l’entreprise au profit du CSE.

Un CHSCT recourt à une expertise pour risque grave

Dans cette affaire, tout commence en juillet 2019 par la décision d’un CHSCT d’une société spécialisée dans la chimie de l’eau de recourir à une expertise pour risque grave. En désaccord avec cette décision, l’employeur saisit le tribunal de grande instance en août et lui demande d’annuler la délibération du CHSCT. Alors que le procès a déjà commencé, le comité social et économique est mis en place dans l’entreprise au mois de septembre 2019. Le nouveau comité, souhaitant maintenir l’expertise, décide d’intervenir volontairement à l’instance comme venant aux droits du CHSCT.

Pas de caducité de la délibération du CHSCT du seul fait de la mise en place du CSE

Pour l’employeur, du fait de la disparition du CHSCT au profit du comité social et économique (CSE) et de l’abrogation de l’ancienne législation, la décision du CHSCT de recourir à l’expertise ne pouvait plus être mise en œuvre. Et d’en déduire que la délibération votée en juillet 2019, avant l’élection du CSE, était donc devenue caduque.

N’étant pas convaincu par l’argument, le président du tribunal de grande instance rejette la demande de caducité de la décision du CHSCT.

La Cour de cassation confirme.

Comme le rappellent les juges, pour permettre la transition entre les anciennes instances représentatives du personnel et le CSE, l’article 9 VI de l’ordonnance n° 2017-1386 du 22 septembre 2017 a prévu que « l’ensemble des biens, droits et obligations, créances et dettes » des CE et des CHSCT notamment étaient « transférés de plein droit et en pleine propriété aux comités sociaux et économiques ». En conséquence, « une délibération d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail décidant du recours à une expertise pour risque grave … ne devient pas caduque de plein droit par suite de la mise en place postérieure du comité social et économique nouvellement élu ».

La question du mandat 

L’employeur fait par ailleurs valoir « qu’en l’absence de délibération du comité social et économique mandatant un de ses membres aux fins d’intervenir à l’instance, cette intervention était irrecevable ».

Demande rejetée par le président tribunal de grande instance. Dans la mesure où les droits, obligations et créances du CHSCT avaient été transférés de plein droit au CSE, celui-ci était bien recevable à intervenir dans l’instance en cours aux droits du CHSCT.

Sur ce point, la Cour de cassation n’est pas d’accord car « l’intervention volontaire du comité social et économique mentionnait que le comité était représenté par ses secrétaire et secrétaire adjoint ». Or, « ni le secrétaire du comité social et économique ni le secrétaire adjoint n’en sont les représentants légaux ». Il appartenait donc au CSE « de justifier qu’il avait mandaté expressément un de ses membres à l’effet de le représenter en justice ». Comme cela n’avait pas été fait, au plus tard avant que le juge ne rende sa décision, l’intervention volontaire du CSE devait bien être déclarée irrecevable.

► Remarque : en application des règles de procédure civile, le fait pour un CSE de ne pas avoir donné mandat à l’un de ses membres pour le représenter valablement en justice constitue une irrégularité de fond qui entraîne la nullité des actes de procédure (article 117 et article 121 du code de procédure civile). Cependant, la situation peut être régularisée en cours d’instance, au plus tard jusqu’au moment où le juge doit statuer (article 122 du code de procédure civile).

Il est donc important pour le CSE qui envisage une action en justice contre l’employeur ou un prestataire de ne pas oublier de donner mandat à l’un de ses membres, et c’est généralement le secrétaire qui est désigné, pour le représenter tout au long de la procédure. Cela peut être prévu une bonne fois pour toute dans le règlement intérieur du comité social et économique. Si rien n’a été stipulé à l’avance dans le règlement intérieur, le CSE devra donner mandat au secrétaire par adoption d’une délibération en réunion.

Source : Actuel-CE