Tous les emplois disponibles doivent être proposés dans le plan de reclassement prévu par un plan de sauvegarde de l’emploi, et ce quelle que soit la durée des contrats de travail.
 
CE 22-7-2021 n° 434362, D.
 

Dans un arrêt destiné à être mentionné aux tables du recueil Lebon, le Conseil d’État précise l’étendue du contrôle exercé par l’administration sur les mesures de reclassement prévues par un plan de sauvegarde de l’emploi (PSE).

L’administration vérifie que tous les postes disponibles ont été identifiés …

Le PSE doit intégrer un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile (C. trav. art. L 1233-61). L’employeur doit, à cette fin, procéder à une recherche sérieuse des postes de reclassement disponibles dans l’entreprise ou, si elle appartient à un groupe, parmi les entreprises du groupe, situées en France (C. trav. L 1233-62, 1°), et dont les activités, l’organisation ou le lieu d’exploitation leur permettent d’effectuer la permutation de tout ou partie du personnel (jurisprudence constante, notamment Cass. soc. 17-5-1995 n° 94-10.535 P : RJS 6/95 n° 632 ; Cass. soc. 13-7-2010 n° 09-43.028 F-D : RJS 10/10 n° 740).

L’administration saisie d’une demande d’homologation du document unilatéral de l’employeur portant PSE va s’attacher à vérifier la conformité du plan de reclassement aux règles légales et conventionnelles applicables (C. trav. art. L 1233-57-3).

Le directeur régional de l’économie, de l’emploi, du travail et des solidarités (Dreets) doit ainsi s’assurer que le plan de reclassement comporte des mesures concrètes et précises de nature à éviter les licenciements ou à en limiter le nombre. A ce sujet, le plan doit notamment préciser le nombre, la nature et la localisation des postes de reclassement (CE ass. 22-7-2015 n° 383481 : RJS 10/15 n° 632 ; CE 7-9-2016 n° 394243 : RJS 12/16 n° 772). Ces points de contrôle sont confirmés, en l’espèce, par le Conseil d’État.

Le Conseil d’État ajoute ici, et c’est nouveau, que l’employeur doit identifier tous les emplois disponibles pour un reclassement interne, et ce quelle que soit la durée des contrats de travail susceptibles d’être proposés pour y pourvoir.

On peut supposer que, lorsque des postes à pourvoir par contrat à durée déterminée sont proposés, le plan devra le préciser.

A noter :

La décision du Conseil d’État ne surprend pas. La Haute Cour administrative adopte la même solution que celle dégagée par la Cour de cassation qui a déjà jugé, en matière de licenciement économique, que les postes pourvus par contrat à durée déterminée doivent être proposés en reclassement (Cass. soc. 29-1-2002 n° 00-41.885 F-D). Le même principe a été retenu en matière de reclassement préalable à un licenciement pour inaptitude physique par la Cour de cassation (Cass. soc. 5-3-2014 n° 12-24.456 F-D : RJS 5/14 n° 395 ; Cass. soc. 4-9-2019 n° 18-18.169 F-D : RJS 11/19 n° 620) et par le Conseil d’État, à propos d’un salarié protégé (CE 11-6-1990 n° 84650 : RJS 9/90 n° 696).

En l’espèce, le PSE restreignait les offres de reclassement aux emplois susceptibles d’être pourvus par contrat à durée indéterminée ou contrat à durée déterminée d’au moins 3 mois. À tort, donc, selon la Haute Cour administrative.

Toutefois, au vu des autres mesures de reclassement que comportait le plan – mise en place d’une antenne emploi, aides financières individuelles à la formation, à la recherche d’emploi et à la mobilité géographique et aides à la création d’entreprise – les juges ont considéré que les mesures prévues par le PSE étaient suffisantes. Ainsi, la circonstance que les contrats de moins de 3 mois n’aient pas été proposés en reclassement n’était pas de nature, en l’espèce, à justifier l’annulation de la décision d’homologation administrative.

… mais les modalités de mise en œuvre du plan échappent à son contrôle

Le PSE accordait aux salariés un délai de 15 jours calendaires pour accepter ou refuser une offre de reclassement proposée par le plan. Les requérants faisaient valoir que ce délai était inférieur aux 15 jours francs accordés aux salariés par l’article D 1233-2-1 du Code du travail pour répondre à une offre de reclassement diffusée par liste.

La cour administrative d’appel leur avait donné raison. La diffusion du plan de reclassement prévu par le PSE devait, selon elle, être assimilée à la publication d’une liste d’offres au sens de l’article D 1233-2-1 précité. Le PSE, en écourtant le délai de réponse imparti aux salariés, était selon elle entaché d’une irrégularité qui avait privé les salariés d’une garantie.

Cette analyse est censurée par le Conseil d’État. Celui-ci estime que le contrôle du Dreets saisi d’une demande d’homologation est limité aux points visés plus haut et que la méconnaissance des modalités de diffusion des offres de reclassement aux salariés faisant l’objet d’un licenciement pour motif économique ne peut pas utilement être invoquée à l’appui d’un recours tendant à l’annulation de la décision par laquelle l’autorité administrative homologue un PSE. Les juges du fond s’étaient donc ici fondés sur un moyen inopérant pour annuler l’homologation du plan, et leur décision est censurée.

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