Le CSE qui agit comme un professionnel du tourisme et non comme un simple intermédiaire des salariés ne peut pas bénéficier de la garantie financière en cas de défaillance de l’agence de voyages.
Le 18 juin 2012, le CE de la société Banque populaire de l’Ouest conclut avec une agence de voyages un contrat portant sur un voyage de 40 personnes au Vietnam, du 10 au 21 novembre 2013. Sur un prix total de 69 496€, le CE verse un acompte de 32 660€. Mais voilà, fin mai 2013, l’agence de voyages est placée en liquidation judiciaire. Une autre agence, Les Parfums du monde, est mandatée par l’Association professionnelle de solidarité du tourisme (APST) pour prendre en charge l’exécution du voyage. Dans un premier temps, le 7 octobre 2013, celle-ci demande au CE le paiement du solde du prix du voyage, déduction faite des acomptes versés. Puis, le 15 octobre, elle réclame le règlement de l’intégralité du prix du voyage.
C’est dans ce contexte que le CE demande à faire jouer auprès de l’APST l’application de la garantie financière pour récupérer les 32 660€ d’acompte versés à la première agence et réclamés par la seconde. L’association refuse, elle est assignée en garantie et en paiement par le CE le 4 décembre 2013.
Demande rejetée tant en appel qu’en cassation.
Pour la Cour de cassation, la garantie financière prévue par le code du tourisme (article R. 211-26), destinée « au remboursement en principal des fonds reçus par l’opérateur de voyages au titre des engagements qu’il a contractés à l’égard de sa clientèle », « ne bénéficie qu’aux consommateurs finaux ». En conséquence, « un comité d’entreprise qui intervient en qualité d’organisateur ou de revendeur de voyages, et non en seule qualité de mandataire des salariés auprès d’une agence de voyages, ne peut en bénéficier ».
Or, ici, le contrat signé avec la première agence de voyages « avait été conclu par le comité d’entreprise qui s’était comporté comme un vendeur direct à l’égard de ses membres ». Celui-ci avait donc bien « agi comme un professionnel du tourisme et non comme un mandataire des salariés ». Il ne pouvait donc pas « revendiquer le bénéfice de la garantie financière de l’APST ».
Cette distinction entre professionnel du tourisme et simple intermédiaire ou mandataire des salariés n’est pas en soi nouvelle. Une jurisprudence du 29 mars 2017 a déjà eu l’occasion d’en faire usage pour refuser à un CE le bénéfice de la garantie financière au motif qu’il n’avait pas agi comme simple intermédiaire ou mandataire transparent entre l’agence de voyages et les salariés mais comme un professionnel du tourisme (Cass. soc., 29 mars 2017, n° 15-26.766).
 
 
Une décision en contradiction avec le code du tourisme ?

Les faits sur lesquels la Cour de cassation se prononce dans cette affaire sont antérieurs à une modification notable du code du tourisme qui n’est pas sans incidence pour les CSE. En effet, une ordonnance du 20 décembre 2017, transposant dans le droit français une directive européenne du 25 novembre 2015 relative aux voyages à forfait et aux prestations de voyage liées, a créer dans le code du tourisme un nouvel article L. 211-1. Il prévoit que les règles qu’il impose aux professionnels du tourisme (immatriculation, garantie financière et assurance responsabilité) ne sont pas applicables « aux personnes qui ne proposent des forfaits, des services de voyage ou ne facilitent la conclusion de prestations de voyage liées qu’à titre occasionnel, dans un but non lucratif et pour un groupe limité de voyageurs uniquement ». On peut légitimement penser que le CSE qui « organise » un voyage annuel au profit des salariés n’est a priori pas considéré comme un professionnel du tourisme. Et dans ce cas, pourquoi le CE ne bénéficierait-il pas de la garantie financière de l’Association professionnelle de solidarité du tourisme (APST) ? A suivre…

 
 
Source – Actuel CE