2017 aura été une année charnière en matière de santé au travail. Une année de mise en place des réformes lancées en 2015 et 2016, qui s’est achevée avec la publication des ordonnances Travail, en septembre. Le bilan annuel des conditions de travail 2017 du Conseil d’orientation des conditions de travail (Coct), rédigé par la direction générale du travail (DGT) et publié le 31 octobre, retrace chaque évolution en la matière mise en oeuvre en 2017. L’occasion d’imaginer les prémices des effets des ordonnances dans la prévention des risques professionnels, une matière sur le point d’être à nouveau réformée.
L’impact des ordonnances Travail de 2017 sur la santé au travail est un sujet qui divise. En particulier s’agissant de la réforme phare des ordonnances, à savoir la fusion des instances représentatives de l’entreprise au sein d’un unique comité social et économique (CSE). Selon les organisations syndicales, cette fusion sonne le glas de la prise en compte des questions de santé au sein de l’entreprise. Les représentants syndicaux rappellent une fois encore leur méfiance au début du rapport du Coct, dans un chapitre préliminaire réservé à leurs contributions. Chargée de missions trop nombreuses et diverses, du fait de la suppression du CHSCT, l’instance unique se trouverait moins bien armée pour donner à la question de la santé au travail la place qu’elle mérite au sein de l’entreprise.
De son côté, la DGT espère que cette réforme portera au contraire la santé et la sécurité au travail « au niveau stratégique de l’entreprise ». Ainsi, dans les entreprises de 50 salariés et plus, le CSE « se réapproprie l’ensemble des attributions préalablement exercées par le CHSCT », notamment l’association à l’analyse et à l’évaluation des risques, et la consultation sur les projets importants et les nouvelles technologies impactant l’organisation du travail. En somme, le CSE pourra agir au niveau de la prise de décision, afin – si nécessaire – d’engager le débat sur l’organisation de l’entreprise pour améliorer la santé au travail.
Selon le rapport, les moyens donnés au CSE en matière de santé et sécurité sont suffisants. Il bénéficie de l’appui d’une commission santé, sécurité et conditions de travail (CSSCT) qui apporte son expertise technique, et les représentants de proximité assurent la remontée de difficultés concrètes rencontrées sur le terrain. « Les acteurs de l’entreprise disposent ainsi d’un lieu unique pour engager une démarche globale de promotion de la santé au travail, envisagée comme vecteur de la performance économique de l’entreprise. » Il ne reste plus qu’à attendre. Les effets bénéfiques du CSE se produiront « sur le long terme » affirme le rapport, le temps que les partenaires sociaux s’approprient cette réforme.
Le rapport souligne la volonté de certaines branches de s’engager en matière de santé au travail, notamment à travers les possibilités ouvertes par les ordonnances. Deux branches ont ainsi conclu en 2017 des accords sur la qualité de vie au travail, deux autres ont conclu un accord sur relatif au suivi de l’état de santé des salariés.
Les ordonnances ont également poursuivi la réforme du compte personnel de prévention de la pénibilité, devenu compte professionnel de prévention. Une dernière touche qui accentue une fois encore la place du dialogue social d’entreprise, souligne le rapport : un nouveau critère, lié à l’indice de sinistralité dans l’entreprise, déclenche désormais l’obligation de négocier un accord en faveur de la prévention de la pénibilité. Certaines branches avaient déjà livré leurs pistes afin d’encadrer la prévention dans leur secteur.
Ainsi, le rapport rappelle que 13 référentiels professionnels de branche sur la pénibilité ont été homologués par les ministres du travail et des affaires sociales entre novembre 2016 et mai 2017 (14 depuis mai 2018). Si ces accords ne couvrent qu’1,17 million de salariés, ils ont l’avantage d’initier le dialogue, en « traçant la voie des pistes à explorer tant pour les branches que pour les entreprises ». D’autant plus que ces référentiels couvrent un champ de prévention plus large : ils concernent l’ensemble des dix facteurs de pénibilité, alors que le compte professionnel de prévention ne concerne plus que six de ces facteurs. De nombreuses branches ont, sans déposer de référentiel officiel, rédigé des guides internes (notamment dans la métallurgie ou le bâtiment). Une preuve de plus, selon la DGT, qui témoigne de l’engagement des organisations professionnelles dans l’appui aux entreprises et au dialogue social.
Source – Actuel CE