La mobilité des salariés – surtout des jeunes générations – justifie de nombreuses réformes, notamment celles liées à la création de droits portables (CPA, CPF,…) afin d’accompagner l’évolution du salarié censé ne plus rester dans la même entreprise tout au long de sa carrière professionnelle. Mais qu’en est-il réellement ? Le service statistique du ministère du travail, la Dares, apporte des premiers éléments de réponse sur la période 2010-2015 (*).
Il en ressort que 13 % seulement des personnes en emploi entre 20 et 50 ans ont émis le souhait de changer de métier. Les motivations sont multiples et nombreuses, souligne la Dares : « étape d’une carrière, aspiration à de meilleures conditions de travail ou de rémunération, recherche de conciliations entre vies familiale et professionnelle, reconversion après une période de chômage ou d’inactivité, ou encore suite à un déménagement, etc. ». La mobilité professionnelle « peut se dérouler en interne à l’entreprise ou en changeant d’employeur, conduire à rester ou non dans le même domaine professionnel, se traduire par une promotion, ou inversement un déclassement ».
Au total, durant cette période, 22 % des personnes en emploi ont changé de métier, principalement des jeunes (un tiers des 20-29 ans). Des changements de métier plus fréquents en début de carrière. Les personnes de 20 à 29 ans ont changé deux fois plus souvent de métier entre 2010 et 2015 que celles de 40 à 50 ans. « Le changement d’emploi, qui peut s’accompagner d’un changement de métier, est en effet beaucoup plus fréquent pour les jeunes adultes, en phase d’insertion sur le marché du travail
S’agissant de l’influence du sexe du la mobilité, la Dares note que les femmes ont une probabilité de changer d’emploi supérieure de 6 points à celle des hommes. L’étude apporte plusieurs d’éléments d’explication à cette différence : « le sous-emploi, plus élevé chez les femmes, pourrait les inciter à changer de métier afin de travailler davantage ; la volonté de trouver un métier permettant une bonne conciliation vie professionnelle-vie familiale l’emporterait sur d’autres considérations chez plus de femmes que d’hommes. La probabilité de changer de domaine est également plus forte pour les femmes (+ 6 points) ».
Par ailleurs, la configuration familiale est un autre facteur discriminant en matière de mobilité. « Vivre en couple réduit la probabilité de changer de métier (- 8 points) par rapport aux célibataires (…) Avoir un enfant réduit la probabilité de changer de métier des hommes. Pour les femmes, la probabilité de changer de métier n’est pas significativement modifiée au premier ou au deuxième enfant, mais elle augmente au troisième ».
L’électricité-électronique et l’artisanat sont les deux domaines où la mobilité professionnelle est forte et cette mobilité s’accompagne fréquemment d’un changement de domaine (…) La probabilité de changer de domaine est ainsi de 11 à 12 points plus élevée que celle observée dans le domaine de l’administration publique, des professions juridiques, de l’armée, de la police ». L’explication ? « Les compétences requises dans l’électricité et l’électronique sont facilement transférables et utiles dans de nombreux autres métiers ». Dans ce domaine, le changement de métier s’accompagne d’un changement d’employeur dans un peu moins de eux tiers des cas.
Dans d’autres secteurs, comme le commerce, le changement d’employeur est plus fréquent, dans 69 % des cas en 2015 (par rapport aux cinq ans passés).
Sans surprise, le concours et l’accès réglementé à une profession limitent le changement de métier ; ainsi, ils sont plus rares dans les domaines de l’éducation et de la formation (5 %), de la santé, de l’action sociale, culturelle et sportive (9 %) par exemple.
La banque et les assurances se caractérisent, elles, par une stabilité en matière de changement de domaine (14 %) et mobile en matière de changement de métier (24 %) et se différencient par une forte mobilité interne. Il présente le plus fort taux de promotion dans les cinq ans (15 %) et figure parmi les domaines les plus stables en matière de changement d’employeur (62 % des personnes ayant changé de métier ont le même employeur que cinq ans auparavant) ». A l’inverse, l’hôtellerie-restauration est le secteur qui connaît la plus forte proportion de changement d’employeur (86 %).
Afin, il est à noter que la mobilité est deux fois plus souvent ascendante que descendante : « parmi les personnes qui ont changé de métier, quatre sur dix appartiennent à un groupe social plus élevé que cinq ans plus tôt alors que deux sur dix voient leur position dégradée ».
(*) Dares analyses, novembre 2018, n° 049, « Changer de métier : quelles personnes et quels emplois sont concernés ? ». Cette étude se fonde sur l’enquête « Formation et qualification professionnelle » (FQP) menée par l’Insee en 2014 et 2015.
Source – Actuel CE